Maracana 8h-20h
En octobre 2004, j'avais pris un café crème dans ce bar, en lisant "Auschwitz graffiti". Je me souviens précisément de la lumière diffusée sur mon livre, de la place brillante de pluie entr'aperçue* au travers de la vitrine et des arcades. J'y suis revenue des dizaines de fois depuis, dehors le plus souvent, sur la terrasse.
Aujourd'hui je me suis installée presque à la même table, j'ai commandé la tarte salade du jour, et j'ai ouvert en attendant, gourmande, l'ouvrage que je venais d'acheter au Scribe rue Michelet. Impossible de lire. Je voyage souvent légère et court vêtue, donc sans lunettes. J'ai mesuré la distance qui me séparait de celle qui lisait sans encombre quatre ans plus tôt sous ces mêmes lampes, dans la pénombre. J'ai rangé mon livre. Observé les lumières qui jouaient sur la machine à café et les verres sagement rangés contre le miroir. J'ai caressé du regard les bouteilles d'eau embuées, alignées sur le comptoir. Un coup d'oeil rapide à mon voisin de banquette aux cheveux blancs : il lit sans peine et sans lunettes un opus minuscule.
Je me laisse bercer par le ronflement de la VMC si peu perturbé par un vague juke-box. L'écran plat veille, sous l'étagère de verre : le nom du bar, 8h-20h police comic sans ms, couleur verte, en mouvement quasi perpétuel.
Je me demande à quoi ressemblait le monde que j'ai connu, avant, à l'époque où je lisais 1984 et le meilleur des mondes**.
* je crois bien qu'il n'y pas d'apostrophe, mais çe me plait d'en mettre une.
** note pour Philoo : mais non, ce n'est pas dans la rubrique " c'était mieux avant" !