humanités
Je suis entrée en sixième en soixante-sept, à l'époque où de bonnes études ne pouvaient s'envisager sans l'apprentissage du Grec et du Latin. Pas d'hésitation, je me suis lancée dans les déclinaisons et conjugaisons de toutes sortes. J'ai cultivé la jouissance de la version où l'on lit entre les lignes et du thème, casse-tête inextricable. J'ai trimbalé mon Gaffiot et appris par coeur des centaines de vers de l'Enéïde. J'ai transpiré sur les déclinaisons grecques, lu Euripide et Eschyle avec ma prof de quatrième, et pleuré avec ma prof de troisième dont j'étais la seule élève et qui me faisait réciter au tableau avec un entêtement non dénué de sadisme*. Je me rappelle encore son odeur de savonette rance, ses jambes maigres et violacées ; j'ai abandonné le Grec en seconde pour la fuir. Certains professeurs, qu'ils soient de Grec ou de musique, scient la branche sur laquelle ils sont assis.
En première, j'ai arrêté le Latin aussi, sans doute pour les mêmes raisons.
Aujourd'hui, je m'interroge...Mais que me reste-t-il de tout cela ? Je suis convaincue que tout apprentissage a une influence sur la structuration mentale, et des effets indirects que nous ne pouvons reconnaître de façon immédiate, ou que nous n'identifierons jamais. Cependant, j'enrage un peu de ne pouvoir accéder à toutes les connaissances que j'avais engrangées et qui se sont évadées, qui sait où...(Quant à savoir ce que j'ai fait vendredi dernier et où j'ai oublié le paquet de copies que j'avais prises pour mon collègue afin de lui rendre...service...)
Après une visite de la cathédrale d'Albi, me documentant sur la légende de Sainte Cécile, je me suis rendu compte que Marc-Aurèle, dont j'aime à grappiller de temps à autre les pensées, la fit exécuter. Il a persécuté les Chrétiens, ce qui n'était qu'ordinaire pour un empereur romain. Et l'imposante cathédrale d'Albi fut édifiée après les persécutions des Cathares, pour symboliser la puissance de l'église Catholique...
(Maintenant il faudrait surement disserter un peu pour faire une note qui aurait l'air intelligente, mais je file à la piscine).
*Je ne l'ai pas déjà raconté ça ? Ah...la sénilité...